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Juges et parties

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Les films de procès constituent un genre fécond au cinéma, tant les deux sont affaire de mise en scène. Dans une unité d’espace et un temps contraint, juges et parties tiennent leur rôle, prenant la parole au rythme imposé par le rituel de la justice, sous le regard attentif du public (de la salle d’audience comme de celle du cinéma). À travers la multiplicité des points de vue et des hypothèses, ce sont aussi l’évolution des mœurs, le rapport entre individu et collectif, qui sont interrogés.

Autopsie d’un meurtre (1959) explore la frontière entre le vrai et le vraisemblable, par le biais d’un avocat qui accepte de défendre un homme accusé d’avoir tué le violeur de sa femme. La dureté du procès qui interroge sans détour l’intimité du couple, l’impossibilité d’établir une vérité – chaque nouvel élément venant encore obscurcir l’affaire – en font un chef d’œuvre du genre, autopsiant tout autant le système judiciaire américain que la complexité humaine. Porté par un casting d’exception : James Stewart, Ben Gazzara jeune et Lee Remick, le film est une influence revendiquée de Justine Triet pour Anatomie d’une chute – référence au titre original de celui de Preminger : Anatomy of Murder.

L’adjectif kafkaïen prend corps sous la direction d’Orson Welles avec Le Procès (1962), alors qu’un homme est arrêté sans connaître les raisons de son crime. L’usage de la bureaucratie comme instrument des régimes totalitaires est ici montré à travers des jeux de cadrages vertigineux. Dans un dédale cauchemardesque, en partie filmé dans la Gare d’Orsay alors désaffectée, Anthony Perkins, alias Joseph K. croise une ribambelle de personnages hauts en couleur (de Romy Schneider à Jeanne Moreau), perdant peu à peu espoir d’éclaircir les raisons de cette arrestation arbitraire.

La critique politique à travers le processus judiciaire est aussi au cœur de l’histoire (vraie) d’Erin Brockovich, transposée à l’écran par Steven Soderbergh. Ce portrait de femme est avant tout l’histoire de son combat – et sa capacité à convaincre d’autres citoyens de la rejoindre - contre une entreprise polluante qui met en péril la santé des populations alentours. L’éblouissante interprétation de Julia Roberts lui vaudra de recevoir l’Oscar, le BAFTA et le Golden Globe de la meilleure actrice en 2001.

Inspiré là encore d’une histoire vraie, Philadelphia (Jonathan Demme, 1993) relate un autre combat : celui d’un avocat licencié après que son cabinet a appris qu’il est homosexuel et atteint de la maladie du sida. Il engage pour sa défense un avocat afro-américain, pourtant homophobe. Tom Hanks et Denzel Washington portent à l’écran cet improbable duo, dans un film bouleversant qui a contribué à lutter contre les stéréotypes entourant la maladie.

La société civile affronte les superstructures dans Bamako d’Abderrahmane Sissako (2006) : jouant des codes du documentaire, le cinéaste reconstitue un procès fictif – bien que résonnant fortement avec le réel -, celui des pays d’Afrique contre la banque mondiale et le FMI. Les scènes de procès alternent avec celles de la vie quotidienne, instaurant un dialogue poétique et engagé autour de l’impact très concret des décisions institutionnelles sur les gens.

60 ans plus tôt, Frank Capra se livre lui aussi à une dénonciation féroce des forces de l’argent dans la scène de procès resté célèbre de L’Extravagant Mr Deeds (1936). Cette comédie humaniste, dont seul Capra a le secret, inaugure – trois ans avant Monsieur Smith au Sénat – la figure de l’homme simple, sorte de Candide moderne, incarné ici par Gary Cooper. Sa seule arme, comme celle du cinéaste lui-même, sera la naïveté, mais elle fait des ravages. Car comment résister au charme jubilatoire de Mr Deeds ?

La comédie se transforme en tragédie dans La Vérité (1960) d’Henri-Georges Clouzot, alors que l’impartialité de la justice est mise à mal par les préjugés de la société bourgeoise de l’époque. C’est alors moins le crime de l’accusée (Brigitte Bardot dans l’un de ses plus grands rôles) que sa quête d’indépendance et son insolente liberté qui sont ici jugées. Clouzot met en place un puzzle narratif brillant pour disséquer une passion dont le système judiciaire est impuissant à percer le mystère.

En Israël, seul un rabbin peut prononcer un divorce, et cela n’est possible qu’avec le consentement du mari. Viviane souhaite se séparer du sien, mais celui-ci refuse. Le procès dans lequel ils se retrouvent touche à l’absurde, face à une situation qui semble inextricable. Avec Le Procès de Viviane Amsalem (2014), Ronit et Shlomi Elkabetz scrutent une société où la religion s’immisce dans l’intime à travers ses tribunaux.

Cinq siècles auparavant c’est l’un des pires tribunaux religieux, celui de l’inquisition, qui condamne Jeanne d’Arc pour hérésie. En 1927, Dreyer choisit d’adapter littéralement les procès-verbaux de l’époque, dans un geste de mise en scène où l’abstraction des décors et le cadre très serré des gros plans cherchent explicitement à « mettre en visage un texte ». Ce visage sera en premier lieu celui de Falconetti qui restera une pure incarnation de La Passion de Jeanne d’Arc.

D’abord actrice, Dorothy Davenport passe derrière la caméra à la mort de son mari, au début des années 20. Elle réalise notamment The Woman Condemned (1934), où une actrice accusée de meurtre trouve un allié en la figure d’un jeune journaliste, aussi amoureux que convaincu de son innocence.


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