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Destins croisés

Destins croisés

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En mars, LaCinetek multiplie les points de vue et les perspectives !

Issus d’une tradition théâtrale donnant la part belle à une distribution d’ensemble, les films de cette sélection déploient une multitude de récits, où les trajectoires se croisent, s’entrelacent, se répondent, pour mieux questionner la relation à l’autre. Si certaines œuvres prennent le prétexte des retrouvailles pour interroger les actes passés et restituer le kaléidoscope des perceptions de chaque personnage, d’autres penchent du côté de la peinture sociale, où l’addition des expériences individuelles forme un chœur, porteur des voix de leur époque et de leur milieu.

Un château, une partie de chasse et de nombreux invités donnent lieu à un curieux marivaudage alors que se profile la Seconde Guerre mondiale. Dans La Règle du jeu, sorti en 1939, Renoir dépeint une galerie de personnages, mêlant les conditions sociales, afin de mieux saisir une société en plein déni du contexte tendu dans lequel elle se trouve. Des indices de ce monde en crise se révèlent cependant derrière l’apparente insouciance du film et l’inspiration revendiquée des comédies de Musset ou de Beaumarchais. Échec public à sa sortie, le film ne cessera d’être revalorisée jusqu’à être considéré par Truffaut comme « le credo des cinéphiles, le film des films ».

Méli-mélo amical et amoureux, Quatre mariages et un enterrement (Mike Newell, 1994) s’organise autour des rencontres successives de Charles et Carrie (Hugh Grant et Andie MacDowell). Devenue culte, cette comédie romantique dynamitée à l’humour anglais relance la comédie britannique. Le film marque également un tournant dans la carrière de Richard Curtis qui en a écrit le scénario, et place Hugh Grant sur le devant de la scène.

Dans un tout autre registre, un enterrement sert également de toile de fond à Ceux qui m’aiment prendront le train (1998) après qu’un peintre reconnu a exprimé la volonté de convier ses proches à Limoges pour ses funérailles. Vrais et faux amis, amants, courtisans, se retrouvent ainsi dans le train, puis chez le frère du mort (Jean-Louis Trintignant), laissant éclater tensions, jalousies et mal-être. Portée par une troupe d’exception, la mise en scène de Patrice Chéreau, fiévreuse, survoltée, produit un rare élan de vitalité derrière l’âpreté des relations humaines.

Le casting est tout aussi éblouissant dans Un conte de Noël d’Arnaud Desplechin (2008) où les fêtes de fin d’année permettent le grand retour du frère banni parmi les siens. Le film se livre alors à une série de règlements de compte familiaux au centre desquels une greffe osseuse vient interroger la notion même de famille. Dans un mélange de cruauté et de drôlerie, la mise à nu des affects convoque l’âme des films de Bergman et de Woody Allen.

Premier film de Mikhäel Hers, Memory Lane (2010) est une fresque sensible sur un groupe de jeunes amis, réunis pour la dernière fois peut-être dans leur ville d’enfance. La peinture d’ensemble s’entrecoupe de portraits individuels, pour mieux saisir la nostalgie mélancolique qui peut aussi surgir aux temps de la jeunesse. 

Indépendamment des ressorts narratifs qu’ils permettent, les films choraux sont aussi l’occasion de décrire un milieu social à travers le prisme d’une variété d’expériences. Marquant le début de la nouvelle vague indé américaine, Slacker de Richard Linklater filme la multitude des habitants d’Austin, ou plutôt ceux qui y vivent à la marge. Avec un ton satirique, Linklater capture des tranches de vies et de philosophie de jeunes et moins jeunes, dont le désœuvrement se mue en posture critique de la société des années 90.

Plongée crépusculaire dans une bourgade hongroise, Le Tango de Satan [Sátántangó] (1994) explore l’incommunicabilité entre des villageois qui semblent avoir perdu tout contact avec leur humanité. La matérialité du plan se substitue au témoignage des hommes, et Béla Tarr nous invite à un parcours contemplatif, à travers l’expérience de l’écoulement du temps et de la pure sensorialité, pour décrire la fin d’un monde, celui du modèle soviétique, au sein d’un village collectiviste.

En 1950, Max Ophüls s’empare de l'œuvre d’Arthur Schnitzler, La Ronde, réactivant le scandale qui avait entouré la pièce à sa sortie en raison de sa dimension sexuelle. Sur fond de critique morale de la Vienne du début du XXème, la pièce comme le film forment littéralement une ronde entre les intrigues amoureuses de multiples personnages, que l’on retrouve tour à tour, d’un tableau à l’autre, jusqu’à ce que le cercle de la danse se referme.

Le Goût des autres, premier film d’Agnès Jaoui en tant que réalisatrice, déplace la question de l’analyse sociale du côté du capital culturel, interrogeant la place du “bon” goût et le snobisme qu’il charrie avec lui. César du Meilleur Film en 2001, on y retrouve une dimension de troupe théâtrale en continuité avec le cinéma d’Alain Resnais pour lequel elle écrivit avec Jean-Pierre Bacri plusieurs scénarios peu de temps auparavant.

Cinéaste par excellence de films choraux, Claude Sautet signe en 1974 Vincent, François, Paul… et les autres, épopée sur les liens d’amitié. Comédie de mœurs, le film explore avec amertume et douceur la tension entre les apparences que l’on se donne et les crises que l’on traverse seul. Sautet sait aussi capter son époque, constituant un témoignage précieux des interrogations existentielles animant les années 70, sur fond de bouleversements sociaux.


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